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Qu'est ce que le paysage ?

L’évolution constante de l'objet “paysage” et de son concept en fait un sujet d’étude mouvant et pertinent au vu des problématiques environnementales qui font l’actualité et de l’évolution de nos pratiques.

C’est en effet une notion complexe et évolutive qui est au carrefour de nombreux champs d’études : géographie, histoire de l’art, philosophie, agriculture, écologie, ethnologie, art, sociologie, botanique, architecture, urbanisme…


Guo XI, paysage à l'entrée du printemps, 1072, National Palace Museum,  ©wikipédia

Guo Xi, paysage à l'entrée du printemps,

1072, National Palace Museum, Taipei

© wikipédia


Quand commence le paysage ?

Dans un premier temps, dans les sociétés agraires, le paysage va être lié à l’environnement tangible qui entoure les hommes.

Il dirige les activités humaines, en tant que lieu de vie, de survie, par l'agriculture et l’élevage. De ce fait, le paysage est une réalité tangible, il est l’environnement dans lequel évolue des groupes de population, un outil de travail.

Parallèlement, dans la littérature grecque antique, les paysages réels et imaginaires sont décrits, romancés, alors qu’en Chine, dès le IVe siècle les paysages sont peints (sanshui). Une réalité artistique se dessine, une volonté de représenter son cadre de vie et de rêve.


Qu’est ce que ça veut dire paysage ?

Cette double conception perdure lors de l’apparition du terme ‘paysage’, d’abord en allemand avec le mot “ landschaft” qui signifie patrie et région au XIIIe siècle, puis du terme italien ‘ paese’ qui définit la représentation picturale d’un pays.

Finalement, deux sens se construisent à partir de ces mots : dans les langues germaniques le paysage s’assimile plus généralement au territoire, à un objet tangible, alors que dans les langues latines il est identifié comme une représentation, une image.

Aujourd’hui dans les formations en école de paysage, formant des concepteurs paysagistes, ces deux aspects sont étudiés, ils constituent et enrichissent les projets étudiants.

Les formations font donc appel à des enseignements pluridisciplinaires en sciences humaines et à des enseignements d’arts plastiques et de représentation.


Quelle est la place du paysage dans la loi ?

La théorisation scientifique du paysage. Dès le XIXe siècle, les géographes allemands étudient les paysages et les sociétés qui y vivent, la notion de paysage intègre le champ scientifique de la géographie.

En parallèle aux Etats-Unis, au Canada et au Mexique, des parcs nationaux sont créés et protégés. De cette manière, l’idée est de créer un parc national mettant en avant les beautés naturelles du pays, comme un écrin à préserver tel quel, avec faune, flore et habitants. Le parc Yellowstone (1872) aux Etats-Unis en est le plus ancien exemple. Il est classé au patrimoine mondial de l'Unesco depuis 1978, suite à la création de la convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel en 1972, qui établit le classement de sites jugés remarquables.

Parc de Yellow Stone, Etats-Unis, © Unesco


En 1992, l’Unesco définit le concept de paysage culturel lors de la convention du patrimoine mondial et parle du paysage culturel comme “ d'œuvres conjuguées de l'être humain et de la nature”.


L'Unesco inscrit ainsi le paysage comme une réalisation humaine.

En France, les premières protections prenant en compte le paysage datent de la loi 1906 qui vise la protection des sites et monuments naturels de caractère artistique. Elle concerne donc des objets isolés, comme des rochers, des arbres remarquables, des grottes, château et parc, l’unique critère était celui de l’esthétique.

Un changement s’opère avec la loi de 1930, « ayant pour objet de réorganiser la protection des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque ».

Avec cette loi, ce sont des espaces qui sont protégés et non plus seulement des objets isolés. Ces lois seront complétées par la loi paysage en 1993, qui fait entrer véritablement la notion de paysage dans le champ législatif.

En 2000, à Florence, la convention européenne du paysage définit le paysage comme : “une partie de territoire telle que perçue par les populations, dont le caractère résulte de l'action de facteurs naturels et/ou humains et de leurs interrelations”.

Cette convention “a pour objet de promouvoir la protection, la gestion et l’aménagement des paysages européens et d’organiser la coopération européenne dans ce domaine”.

Comment est investi le paysage dans l'aménagement du territoire ?


Parc Montsouris, Paris

©renaissance des cités d'europe


En tant que cadre de vie, le paysage a évidemment une portée urbaine. On pense par exemple au courant hygiéniste du XIXe siècle, durant lequel la ville est repensée pour laisser pénétrer l’air, la lumière, la verdure. A cette époque, de grands parcs comme Montsouris à Paris, le Jardin Public à Bordeaux, le parc de la tête d’or à Lyon, sont construits comme des espaces de respiration pour la population.


Concept des cités-jardins théorisé

par Ebenezer Howard, ©open édition books


Au XXe siècle, les cités jardins théorisées par Ebenezer Howard, inscrivent la place de la nature dans la conception urbaine, par la présence d’une ceinture agricole autour de cette cité reliée par un réseau ferroviaire.


De nombreux projets ont été réalisés partout dans le monde : Canada, Etats-Unis, France, Angleterre, Belgique, Australie.


Plus tard dans ce siècle, les cités jardins sont oubliées par les modernistes. Mais la place de la nature est toujours réfléchie, notamment chez Le Corbusier, qui portait une attention à la lumière, aux panoramas dans ses projets.



La question du paysage dans les projets urbains n’est donc pas nouvelle.

Avec les préoccupations environnementales qui constituent l’actualité s’ouvre un pan du développement durable au sein des nouveaux projets urbains où fleurissent des écoquartiers et des projets paysagers.

Projet d'écoquartier " La fabrique", Marseille

© made in Marseille



Labels, biennales, victoires, tout comme l’architecture, le paysage est une discipline centrale dans le secteur de l’aménagement. Un vocabulaire nouveau se déploie : îlot de fraîcheur, trame bleue, trame verte, trame noire, liaison douce.

Tous ces aménagements sont vécus comme un gage, une promesse de qualité de vie, devenant parfois de véritables arguments marketing.

L’inscription de la nature se déploie depuis des siècles en ville. On peut se demander quels modèles sont viables et souhaitables au travers des multiples interprétations conceptuelles que les aménageurs font du terme paysage. Finalement, est ce que ce terme “surinvesti” répond aujourd’hui aux enjeux contemporains ? Est-ce que les pratiques paysagères, garantes de belles promesses, les tiennent ?


Sources :


Bailly A, Raffestin C, Reymond H., Les concepts du paysage : problématique et représentations, Espace géographique, 1980


Cauquelin, A, L'Invention du paysage (1989), Paris, PUF, 2007


Corbin A, Lebrun J, L’homme dans le paysage : entretien avec Jean Lebrun, 2001


Donadieu P, « Le paysage », Économie rurale [En ligne], 297-298 | janvier-avril 2007, mis en ligne le 01 mars 2009


Donadieu P, Périgord Michel, Le paysage, Armand Colin, Paris, 2007


Rambaud, I. (sous la dir. de), Patrimoine et Paysages, coll. « Cahiers Jean Hubert 3 », Lyon, Éditions Lieux dits, 2009


Centre de ressources régional des paysages d’Auvergne Rhône Alpes, . Outils réglementaires ou contractuels pour la protection et la gestion des paysages. 27 décembre 2018








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